Legends Of The North
Interview
Entretien avec René Manzor / Extrait du dossier de presse, 25 mars 1995
« Légendes du Grand Nord » est adapté d’un recueil de nouvelles de Jack London intitulé « Bellew la fumée », dans lequel London s’attaque à un genre qu’il n’avait jamais abordé auparavant : la comédie. Et c’est avec bonheur qu’on découvre que celui qui nous a ému dans « Croc Blanc » ou dans « Le Loup des mers » peut également nous faire rire. On sourit plus qu’on ne rit. On sourit avec tendresse ; la tendresse qu’on éprouve aussitôt pour ses personnages, des moins scrupuleux aux plus menteurs.
Comme Voltaire, London connaît l’efficacité du « candide » et l’on se reconnaît dans Bellew, alias Bel-Air. Comme lui, on ne connaît rien au Yukon, comme lui, on est prêt à tout croire. Et le héros sommeille en nous comme en lui.
Mais la comédie de London est une comédie « chaplinesque » ou italienne. Elle est douce-amère. Les personnages ont trop de profondeur pour naviguer en surface et dès que l’occasion se présente, London revient à ses premières amours : le récit se fait plus grave dans certaines nouvelles.
Le passage d’une émotion à l’autre. Il n’y a rien de plus dangereux. Le trapéziste et le dompteur de fauves vous le diront, qui admirent le clown pour cela. C’est dans le mariage des énergies contraires que résident le danger et la magie.
Les américains vous répondront qu’il faut choisir un genre et s’y tenir. Si c’est une comédie, alors le film se doit de rester une comédie et l’on doit bannir de l’adaptation des scènes, même splendides, les sacrifier sur l’autel du genre. En Europe, on ne partage pas ce point de vue et l’on tombe parfois dans l’excès inverse, à tel point que le spectateur ne sait plus quelle histoire on raconte.
Dans « Légendes du Grand Nord », j’ai voulu prendre ce qu’il y a de mieux dans les deux écoles, explorer une troisième voie. Même nos dramaturges les plus classiques qui préconisaient l’unité de temps, de lieu et d’action, n’ont jamais parlé de l’unité de ton.
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